Bienvenue sur Dandelion

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Le blog estampillé Littérature 2.0

Chroniques littéraires et observateur de la dématérialisation du Livre

dimanche 30 mars 2014

Le salon du livre de Paris 2014

Comme tout nouveau blogueur littéraire qui se respecte, je ne pouvais passer outre la grande messe du livre hexagonale, le salon du livre de Paris 2014, le premier du genre en ce qui me concerne.

Ayant choisi la journée de dimanche, Guillaume Staelens l'auteur d'Itinéraire d'un poète apache, mon premier coup de cœur de l'année, y étant en dédicace sur le stand des éditions Vivianne Hamy, j'eus comme tout le monde en ce jour de repos dominical, besoin de jouer des coudes pour parvenir à temps afin de recueillir le seul sésame que j'étais venu glaner.


Après avoir taillé le bout de gras avec lui, je me lançais donc au milieu de ces hordes de lecteurs dans la visite du salon à proprement parlé.
Pas une ne manque à l'appel, les grandes maisons de l'édition française sont là. Ce qui me stupéfait très vite, c'est la pléthore de petits éditeurs présente, qu'ils soient français (selon le SNE, il en existerait environ 10 000 en France) ou non (bon nombre d'éditeurs étrangers sont invités), souvent spécialisés sur des niches (jeunesse, poésie, régionalisme...) et n'éditant parfois que quelques livres ou recueils par an, ce sont tous des passionnés qui œuvrent pour leur amour du livre et de la lecture.

En cette année 2014, les organisateurs ont décidé de mettre à l'honneur la littérature Argentine ainsi que la ville de Shanghai, tout cela me laisse de marbre.  

Je croise ça et là des people de la littérature et quelque un des auteurs chroniqués ces derniers mois sur Dandelion. Juste une petite photo, je me refuse à jouer les groupies.


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Je me jette sur une chaise libre de la grande scène et le "hasard" me fait assister à une interview des Bogdanov - en fait un véritable show -, que je fuis pour aller jauger le rayonnement de la littérature numérique. J'ai immédiatement cette impression que celle-ci a été mis de coté loin des éditeurs papier, je comprends, il faut éviter la contamination. Il y règne pourtant une joyeuse émulation où l'autoédition est mise à l'honneur avec l'immense stand du Kindle d'Amazon. Youboox, le Deezer de la littérature y présente son concept avec un catalogue qui manque encore cruellement de grands noms. La palme du plus beau stand numérique pour la liseuse étanche Aqua qui va faire des émules pour les fans de lectures qui n'osent, comme moi, sortir leur tablette/liseuse/smartphone à la plage.  

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18H, les travées se vide, je recommence mon périple depuis le début, je peux désormais flâner les épaules dégagées, je suis un enfant dans le plus grand des magasins de jouet.

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Une dernière découverte sur le stand des Editions du Léopard masqué, avec un pastiche qu'il vous sera facile de reconnaître : Les aventures de Saint-Tin et son ami Lou.  

Rendez-vous pris pour mars 2015.

AL  

mardi 18 mars 2014

L'écrivain de la famille de Grégoire Delacourt

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Résumé de l'éditeur:

À sept ans, Edouard écrit son premier poème. Trois rimes pauvres qui vont le porter aux nues et faire de lui l’écrivain de la famille. Mais à neuf, il découvre le sens de « déchéance ». Les mots ne lui viennent plus. 

Les années passent. Il assiste à la lente décomposition de sa famille et court toujours derrière l’amour que son poème, autrefois, suscita. Il écrit, écrit mais le destin que les autres vous choisissent n’est jamais tout à fait le bon. Edouard n’a pas de talent. Sauf dans la publicité où les mots futiles valent de l’or. Pas pour ce grand roman qu’il s’est juré d’écrire. 



N’ayant pas su trouver les mots qu’on attendait de lui, Edouard, l’écrivain de la famille, vit dans l’échec et le dégoût de soi. Alors quand la beauté de sa mère se fane, quand son frère-oiseau meurt tragiquement, quand le cœur de sa sœur devient pierre et que son père disparaît dans ses silences, il prend la plume pour écrire l’histoire de ceux qu’il aime. 
Mais surtout pour en changer la fin.


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Lorsqu'un auteur connait un soudain succès d'écriture, ce fut le cas pour Grégoire Delacourt avec La Liste de mes envies, vendu à plus de 500 000 exemplaires, (pour la petite histoire il fut le premier livre chroniqué sur Dandelion), une certaine critique, jusque-là souvent pleine de bienveillance, change diamétralement de ton et cherche suspicieusement quel filon il a bien pu utiliser. 

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Ce phénomène, qui touche particulièrement les auteurs dits "populaires", ceux qui parviennent à faire lire une catégorie de lecteurs non-assidus, qui ne lisent parfois qu'un seul livre par an ;  Grégoire Delacourt en fait l'objet, d'une force qui me laisse perplexe. Il  me semble même être devenu, lui aussi, sur la blogosphère et les réseaux sociaux, comme le sont les Marc Levy, Guillaume Musso ou Catherine Pancol, un des symboles de cette littérature récréative conduite principalement, selon ses détracteurs, par le marketing scoré et non pas par une idée lumineuse et tellement grisante qu'elle ne peut décemment ne pas être couchée sur le papier ; allez voir ce que donne sur Twitter le #grégoiredelacourt si ne voyez absolument pas à quoi je fais allusion.  Bien que j'ai peur de ne pas être tout à fait objectif le concernant ; celui-ci, ayant passé une partie de sa jeunesse, en pension, dans un collège de la ville, Amiens, m'ayant vu naître, est loin de mériter, à mon sens, cette réputation d'écrivain de vague ou de tendance.
      
Oui, Grégoire Delacourt situe ses trois trois romans (son troisième paru en 2013 est La Première chose qu'on regarde) dans la classe populaire et s'il la "drague" aussi bien n'est-il pas simplement qu'il en est le rejeton, gage indéniable de réalisme et de sincérité ? Stephen King en novembre dernier, lors de sa visite pour la promotion française de Docteur Sleep, s'adressant aux apprentis écrivains ne disait-il pas "Ecrivez sur ce que vous connaissez et vos manuscrits n'en seront que plus sincères" ?

C'est ce que fit Grégoire Delacourt dans son premier roman L'écrivain de la famille, livre hautement autobiographique qui reprend des pans entiers de sa vie et qui après l'avoir lu longtemps après les deux autres m'apparaît comme son meilleur. Tout à la fois concis (les romans fleuves américains occupent suffisamment de mon temps de lecture pour que j'en préfère des français moins prolixes), grave et souvent touchant (thème du handicap, de la déliquescence du couple, de la mort, de la construction de soi sur ce que l'on vous a prédestiné à devenir...) mais pas dénué de drôlerie, d'un style simple mais souvent poétique (« Quand on est très petit, la longueur des bras permet juste d'atteindre le cœur de ceux qui nous embrassent. Quand on est grand, de les maintenir à distance. ») et parsemé d'un name dropping judicieux, pain béni pour les développeurs de livres augmentés (voir l'animation sur son site www.gregoiredelacourt.com pour vous en donner une idée), L'écrivain de la famille est le livre d'un homme qui raconte comment, et ce malgré les aléas de la vie, l'envie d'écrire ne vous quitte jamais.

Si vous lisez ce billet pour finir de vous convaincre, n’hésitez plus. Pour les autres, avant de vous remettre à la vindicte lisez L'écrivain de la famille et s'il ne vous convainc toujours pas d'être l'oeuvre d'un vrai écrivain, populaire soit mais sincère et qui a le mérite de faire lire le métro, c'est alors vraisemblablement une histoire de gout. Et comme l'on dit: les histoires de gout, cela ne se discute pas.        

AL




And now, Don't waste your time and will to read a fucking book !!!

jeudi 13 mars 2014

Les Contrerimes de Paul-Jean Toulet

Je vous parlais dernièrement de Premier bilan après l'Apocalypse de Frédéric Beigbeder où celui-ci présente les 100 livres qui ont le plus compté dans sa vie. De façon tout à fait surprenante le poète Paul-Jean Toulet y apparaît deux fois: à la 61 ème place avec Mon amie Nane publié en 1905 mais surtout à la 6 ème place avec son recueil le plus connu Les Contrerimes (1921, à titre posthume).

La contrerime dont Toulet est donc l'instigateur est un quatrain d'une construction particulière mais que je me refuserais à expliquer dans ce billet pour n'en garder que la grâce. Alors que celui-ci est toujours considéré comme un poète mineur, son style offrant une poésie courte (où se succède donc les contrerimes) mais non dénuée de nuances gagnerait à revenir en grâce (qu'elle n'a jamais pourtant perdue) au temps de l’avènement de la lecture numérique où les textes longs sont de plus en plus rejetés, zapping oblige. Une petite contrerime entre deux textos un mail et un petit tour sur les réseaux sociaux est moins compliquée à placer que Naissance de Yann Moix (1200 pages) et revêt l'avantage de l'exhaustivité.

Et pour la petite histoire, il n'est pas si étonnant de trouver Toulet dans le top 100 de Beigbeder, les deux auteurs ayant en commun  le village de Guéthary.

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L’hiver bat la vitre et le toit. 
 Il fait bon dans la chambre, 
À part cette sale odeur d’ambre 
Et de plaisir. Mais toi, 
 Les roses naissent sur ta face 
 Quand tu ris près du feu... 
Ce soir tu me diras adieu, 
 Ombre, que l’ombre efface.

***
La vie est plus vaine une image 
Que l’ombre sur le mur. 
Pourtant l’hiéroglyphe obscur 
Qu’y trace ton passage
 
M’enchante, et ton rire pareil 
Au vif éclat des armes ; 
Et jusqu’à ces menteuses larmes 
Qui miraient le soleil. 

Mourir non plus n’est ombre vaine. 
La nuit, quand tu as peur, 
N’écoute pas battre ton cœur : 
C’est une étrange peine.

AL

dimanche 9 mars 2014

Réparer les vivants de Maylis de Kerangal

Corniche Kennedy, son quatrième roman publié en 2008 et présent dans la liste de plusieurs prix littéraire de renom (Femina, Médicis) avait fait connaître à la France entière Maylis de Kerangal, cette auteure né à Toulon mais ayant passé la majeure partie de sa jeunesse au Havre.

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Avec naissance d'un pont, Maylis de Kerangal transformait l'essai en décrochant à l'unanimité le prix Médicis 2010.Cette épopée humaine, autour de la construction d'un pont - pourtant librement inspiré d'un pont cher à mon cœur, le Golden Gate de San Franscisco - ne m'avait pas séduit ; je notais tout de même trois lettres, MdK.

En choisissant de nous raconter une autre épopée humaine, celle de la transplantation cardiaque, Maylis de Kerangal piquait cette fois ma curiosité en me proposant une nouvelle digression au milieu de mon thème de cette année 2014 des grands romanciers américains qui peine décidément à prendre le dessus.  

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résumé de l'éditeur:

«Le cœur de Simon migrait dans un autre endroit du pays, ses reins, son foie et ses poumons gagnaient d'autres provinces, ils filaient vers d'autres corps.»

Réparer les vivants est le roman d'une transplantation cardiaque. Telle une chanson de gestes, il tisse les présences et les espaces, les voix et les actes qui vont se relayer en vingt-quatre heures exactement. Roman de tension et de patience, d'accélérations paniques et de pauses méditatives, il trace une aventure métaphysique, à la fois collective et intime, où le cœur, au-delà de sa fonction organique, demeure le siège des affects et le symbole de l'amour.

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Une entame, un premier paragraphe, une interrogation (ce qu'est le cœur de Simon Limbres...) et tout cela en une seule phrase. L'état d'urgence est installé, le compte à rebours lancé. Je le savais avant d'ouvrir le livre, Simon Limbres va donc mourir et après l'épopée humaine de la naissance d'un pont  Maylis de Kerangal raconte un autre miracle possible lorsque les hommes se mettent au diapason, réparer les vivants.
Cette semaine, le premier homme doté d'un cœur artificiel est mort deux mois et demi après son opération. Malgré ce fol espoir de la bio-médecine, il ne demeure encore qu'une solution lorsque l'organe roi,  l'analogie même de la vie est défaillant et doit être remplacé. Mais cette prouesse, cet acte magistral n'est possible que grâce à une découverte fondamentale, énoncée en 1959 par deux médecins français, Maurice Goulon et Pierre Mollaret: l’arrêt du cœur n'est plus le signe de la mort c'est désormais l'abolition des fonctions cérébrales qui l'atteste. [...] Si je ne pense plus alors je ne suis plus. Ainsi, couplés à cette découverte, les progrès des techniques de réanimation permettant d'irriguer le cerveau de patients en état de mort cérébrale et qui sans celles-ci auraient basculer irrémédiablement dans la mort cardiaque, au delà d'énoncer une nouvelle définition de la mort, eu aussi pour conséquence de permettre les prélèvements d'organes.
C'est sur ce sujet précis que Maylis de Kerangal a choisi d'axer son récit, de développer sa réflexion. Ainsi, les interrogations autour de la mort de Simon (qui conduisait, que s'est-il passé ?) ou de la façon dont sa petite amie appréhenda la perte irréparable de son premier amour ne sont même pas évoquées ;
si certains personnages sont développés plus que d'autres, c'est qu'ils gravitent tous autour de l'acte de la transplantation (médecin qui constate la mort, infirmier coordinateur, infirmière qui assiste, chirurgien qui prélève et réimplante, parents qui disent "oui", patient qui reçoit ) en sont un maillage indispensable.

Maylis de Kerangal raconte avec précision toutes les étapes de ce prodige mais évidement vu la porté presque philosophique de l'acte, s'interroge et tente de répondre à des questions fondamentales:

[...] la loi induisant encore autre chose, une notion plus complexe qui tenait de la réciprocité, de l'échange: chaque individu étant un receveur présumé potentiel, était-il si illogique , si infondé, après tout, que chacun soit envisagé comme un donneur présumé après sa mort ?

Si c'est un don, il est tout de même d'un genre spécial, pense-t-elle. Il n'y a pas de donneur dans cette opération, personne n'a eu l'intention de faire un don, et de même il n'y a pas de donataire, puisqu'elle n'est pas en mesure de refuser l'organe, elle doit le recevoir si elle veut survivre, alors quoi qu'est ce que c'est ?

Avec en sus une écriture riche, fournie, travaillée, parfois époustouflante, quelques fois surprenante - des digressions pleine d'érudition viennent parfois émaillées le court de la narration comme pour nous permettre de reprendre notre souffle - Réparer les vivants est un réussite à tous les plans.

AL

Liens:


Maylis de Kerangal : « Réparer les vivants » par Mediapart